FOURRURES ET MODE

À chacun son chapeau

À l'époque, on reconnaît la classe sociale d'un individu à son chapeau. Chaque régime politique sous-tend aussi une nouvelle vogue de chapeaux. Ce sont toutefois les hauts-de-forme, portés par les bourgeois, qui accroissent la demande pour la fourrure de castor de la région d'Athabasca. Ayant exterminé la presque totalité des populations de castors de leurs régions, les Européens se tournent vers le Canada pour répondre à la demande. C'est en fait le duvet de castor qui est très recherché par les fourreurs, constitué d'une fourrure courte et épaisse, mais surtout très douce. La mode du chapeau de soie viendra éventuellement supplanter celle du chapeau de castor.

Un chasseur sachant chasser.

La fourrure du castor est plus épaisse durant l'hiver. C'est donc principalement pendant cette période que les Autochtones vont à la chasse.

Les chasseurs bloquent d'abord les sorties des tunnels creusés par les castors. Ils détruisent ensuite leur hutte et les abattent au moyen d'hameçons ou de harpons. Ils utilisent parfois des lignes de piégeage ou défont les barrages des castors, révélant les entrées des huttes. Parfois, ils percent plusieurs trous dans la glace autour d'une hutte et y installent des filets. Ils détruisent ensuite la hutte et saisissent les castors en fuite. L'été, ils les attirent avec des brindilles de peuplier ou des rognons de castor, dans des pièges distribués près des cours d'eau.

Le cycle de production

Les femmes autochtones nettoient et assèchent la peau de castor qu'elles tendent sur un cerceau de bois. Pour tanner une peau, elles l'enduisent parfois de cerveau ou de moelle osseuse de castor avant de l'exposer à la fumée. Plus souvent, elles étirent, grattent et assèchent la peau pour produire ce que les commerçants de fourrures appellent du « castor en parchemin ». Finalement, la peau est offerte aux marchands en échange de produits européens.

Les commerçants compriment les pelleteries dans des ballots de 40,5 kg, lient ces derniers et les enveloppent en utilisant des peaux moins précieuses ou de la toile. Les peaux se transportent et se rangent ainsi plus facilement dans les canots à destination des principaux forts des compagnies de traite. C'est là qu'elles sont nettoyées, triées, inventoriées et mises en ballot de nouveau avant leur transport vers Montréal, d'où elles sont acheminées par bateau jusqu'en Angleterre.

Une fois à destination, la fourrure de castor est vendue aux enchères à des chapeliers anglais. Ils confectionnent en moyenne un chapeau à partir d'une fourrure de castor de bonne dimension.

Le castor comme devise

Dans le Pays d'en haut, la norme commerciale ou l'unité monétaire est fondée sur la valeur assignée à une peau de castor en bon état. L'adoption de cette unité monétaire simplifie la pratique du troc et la tenue de la comptabilité. Tous les articles commerciaux, qu'il s'agisse de marchandises européennes ou autochtones, ont une valeur équivalente en peaux de castor en bon état. L'unité d'échange est connue à la Compagnie du Nord-Ouest sous le nom de pelu (ou plue). La Compagnie de la Baie d'Hudson l'appelle le castor fabriqué.

La valeur du pelu varie selon les années et selon les districts, en fonction des coûts de transport.

La liste suivante est fondée sur les dossiers du poste de traite du lac du Flameau de 1805-1806 :

Taux de change en pelus ou en castors fabriqués

Marchandise	Valeur
Objets de commerce
Couverture, 1 point	1
Chemise de coton ou de flanelle	2
Poudre noire (1 lb)	2
Balles de mousquet (1 lb)	1
Longs couteaux	¼
Bouilloire	5½
Tabac (1 pied)	½
Capot, 4 ells (1 ell = 114 cm de tissu)	5
Fourrures et provisions
Castor	1
Rat musqué	1/10
Martre	½
Loutre	2
Peau d'ours	2
Viande d'un orignal	6
Sucre d'érable (1 lb)	1/10

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